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L’Inde et le Japon testent leurs jets. Un nouveau message à la Chine

(Rome, 09 septembre 2022). Tokyo et New Delhi mèneront le premier exercice aérien conjoint en réponse à l’affirmation de la Chine dans la région Indo-Pacifique. Il s’agit du jeu d’équilibre de l’Inde entre la Chine, Taïwan, les États-Unis et la Russie

Après les importants exercices militaires de Pékin ayant suivi la visite de Nancy Pelosi à Taïwan, c’est au tour de New Delhi et de Tokyo de faire entendre leur voix. Les ministres des affaires étrangères et de la défense du Japon et de l’Inde sont parvenus à un accord visant à organiser un exercice conjoint dès que possible. L’exercice, en réalité, déjà prévu pour 2020, puis reporté en raison de la pandémie de Covid-19, sera le premier à être mené avec des moyens aériens des deux pays, comme le rapporte Matteo Turato dans son analyse dans le quotidien italien «Formiche».

L’opération s’inscrit dans un contexte de la région Indo-Pacifique, de plus en plus tendu. L’Inde et le Japon craignent l’affirmation de la Chine dans la région et invoquent avec force l’état de droit dans la région, exprimant leur opposition à toute tentative unilatérale de modifier son statu quo. En ce sens, l’organisation sécuritaire multilatérale du Quad, à traction américaine, qui réunit l’Inde, le Japon, l’Australie et les États-Unis, revêt une importance cruciale. Comme le rapporte Kyodo News, la réunion précède un possible sommet entre le Premier ministre japonais Fumio Kishida et son homologue indien Narendra Modi à la fin du mois.

Après la visite de Nancy Pelosi, le Japon a vu des missiles chinois tomber dans sa zone économique exclusive (ZEE) en mer de Chine orientale et ne peut pas rester les bras croisés. Comme l’a déclaré le ministre des Affaires étrangères Hayashi : « Les récents actes militaires de la Chine constituent un grave problème pour la sécurité du Japon et pourraient avoir de graves répercussions sur la paix et la stabilité internationales ». La déclaration indique que le Japon « examinera toutes les options » visant à renforcer sa défense, comme l’acquisition d’une « capacité de contre-attaque », et augmentera considérablement les dépenses de défense. Le gouvernement de Kishida avait récemment annoncé son objectif de doubler les dépenses de défense, les portant à 2 % du PIB au cours des cinq prochaines années.

Pendant ce temps, l’Inde pèse le pour et le contre. Les relations avec la Chine n’ont jamais été bien raccommodées après le conflit frontalier dans l’Himalaya en 2020, lorsque vingt soldats indiens ont perdu la vie lors des affrontements. C’est précisément dans les zones frontalières indiennes, que des structures de surveillance et des infrastructures militaires sont en cours de construction qui ne laissent pas présager d’un adoucissement. D’autre part, il y a la relation amicale avec Moscou, avec qui New Delhi a participé cet été à un exercice militaire dans l’est de la Russie. En outre, l’Inde s’est abstenue d’adhérer aux sanctions internationales suite à la guerre en Ukraine. En bref, du point de vue de New Delhi, il est nécessaire d’utiliser le levier russe et américain contre Pékin, ce qui n’est pas une tâche facile compte tenu des relations post-invasion de l’Ukraine, entre Washington et Moscou.

Est-il temps pour New Delhi d’approfondir ses liens avec Taipei ? Les relations sont actuellement faibles. Des tentatives ont été faites pour accroître l’engagement commercial et industriel, notamment dans le domaine du renforcement des chaînes de valeur. Mais la volonté de ne pas rompre totalement avec Pékin a mis un coup d’arrêt à toutes ces initiatives, notamment en lien avec la montée des tensions frontalières dans la région du Ladakh.

De son côté, Pékin espère que l’Inde reviendra à « travailler ensemble rapidement », selon les termes du ministre des Affaires étrangères Wang Yi. Mais le dialogue entre les deux parties n’a pas été très loin après les violations répétées par Pékin de la ligne de contrôle réel (LAC) en 2020. Les frictions s’étaient apaisées, mais il reste encore plusieurs nœuds à résoudre dans les zones des sources chaudes, Demchok et Depsang. .

La frange la plus anti-chinoise de New Delhi fait pression pour que le gouvernement reconsidère la politique du statu quo en mer de Chine méridionale afin d’adopter une posture plus agressive, et pour que l’agenda de la politique étrangère indienne soit aligné sur celui du Quad. En bref, les frictions entre la Chine et l’Inde ne semblent pas s’apaiser et, au mieux, elles resteront figées jusqu’à ce que de nouvelles initiatives chinoises soient prises dans la région.

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