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Macron prend ses distances avec Biden: «Je n’aurais pas traité Poutine de boucher»

(Paris, 27 mars 2022). Malheur à lui s’il alimente une escalade avec la Russie, car la situation pourrait s’embraser en un instant, réduisant à néant tous les efforts diplomatiques déployés jusqu’à présent. Avec son pragmatisme habituel, dont il fait preuve depuis le début de la guerre en Ukraine, Emmanuel Macron a, d’une certaine manière, tiré les oreilles de Joe Biden, comme le rapporte Federico Giuliani, dans le journal italien «Il Giornale/Inside Over».

Le président français a en effet déclaré qu’il n’utiliserait pas la définition de « boucher » à l’encontre de Vladimir Poutine ; au contraire, une définition adoptée par Biden avait suscité une vive polémique. Macron est allé encore plus loin, expliquant qu’il ne devait pas y avoir « d’escalade de paroles ou d’actes » dans conflit ukrainien.

Dans les prochaines heures, « demain ou après-demain », le chef de l’Elysée a indiqué qu’il parlerait pour la énième fois au téléphone avec Poutine pour organiser une opération d’évacuation des civils de la ville meurtrie de Marioupol.

 Une gaffe dangereuse

Il est inutile d’ignorer ou de lire les clarifications fournies par la Maison Blanche : il est clair (plusieurs sources l’affirment maintenant, principalement le Washington Post) que Biden est allé au-delà des limites de son discours, ajoutant quelques considérations personnelles très dangereuses. Des considérations qui, aux yeux du monde entier mais surtout de Moscou, sonnent comme de véritables provocations.

Oui, car depuis le Château royal de Varsovie, où le président américain était attendu pour un discours après avoir visité la 82e division aéroportée des États-Unis basée à Rzeszow, le locataire de la Maison Blanche s’est lancé dans de lourdes accusations à l’adresse de Poutine. Biden aurait dû se limiter à aborder les points convenus avec son équipe, citant Jean-Paul II et Abraham Lincoln. En outre, il est allé plus loin, qualifiant le président russe de « dictateur qui veut reconstruire un empire » et de « tyran » qui « ne peut pas rester au pouvoir ».

Deux types de réponses sont venus de Moscou. Dans la première, le Kremlin a souligné qu’il n’appartient pas à Biden de décider qui est le chef de la Fédération de Russie ; dans la seconde, qui est la partie qui nous intéresse le plus, les Russes ont fait savoir que « les nouvelles insultes de Biden réduisent encore la fenêtre d’opportunité pour réparer les relations entre la Russie et les États-Unis ».

Les (éventuelles) conséquences diplomatiques

En d’autres termes, la sortie malheureuse de Biden risque d’envoyer (ou d’avoir envoyé) en fumée toute lueur possible d’un dialogue. Bien que la Maison Blanche ait clairement indiqué que le président américain « ne remettait pas en cause le pouvoir de Poutine en Russie, ni n’évoquait la possibilité d’un changement de régime à Moscou », le Kremlin a reçu un autre message. A savoir, que les États-Unis n’attendent rien de plus que de faire tomber Poutine et de renverser son gouvernement.

L’entrée de Macron de pied ferme était inévitable, presque comme s’il voulait prendre ses distances avec Biden, poursuit Federico Giuliani. Car c’est finalement le président français lui-même qui s’est entretenu à plusieurs reprises avec Poutine pour tenter de parvenir à un accord compliqué. Et pour cause, encore Macron, il avait salué son homologue russe avec la promesse que les parties, à savoir la France et la Russie, resteraient en contact pour de nouvelles discussions. Lors d’un appel téléphonique, le chef du Kremlin avait même rassuré son interlocuteur que l’armée russe ne toucherait pas de cibles civiles.

En bref, aussi ridicule que cela puisse être, un subtil fil diplomatique reliait Poutine à l’Europe. Avec sa dernière intervention, Biden a été à deux doigts de le briser. Il l’a peut-être déjà rompu malgré les paroles du Président Macron.

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