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Les États-Unis et Israël continuent de parler de l’Iran au milieu des tensions russes

(Rome, Paris, 27 janvier 2022). Les Israéliens craignent que les tensions en Ukraine ne détournent l’attention internationale du dossier iranien, et que la crise entre les États-Unis et la Russie ne complique davantage la discussion autour du JCPOA

Alors que les négociations sur le nucléaire à Vienne approchent d’un tournant (et d’une décision), les États-Unis et Israël ont tenu des pourparlers stratégiques sur l’Iran menés par leurs conseillers respectifs à la sécurité nationale, ont indiqué des responsables israéliens et américains à Barak Ravid, un journaliste bien informé d’Axios.

Comme le rapporte Emanuele Rossi dans le quotidien italien «Formiche», ces rencontres sont importantes car, à un moment où l’attention de la Maison Blanche est largement focalisée sur l’Ukraine, donc sur les tensions avec la Russie, les pourparlers montrent que l’Iran est et reste un point en suspens sur lequel l’administration Biden est appelée à consacrer du temps – notamment parce que des alliés comme Israël exigent des consultations.

D’autant plus que Jérusalem, renforcée par les accords abrahamiques, pourrait jouer un rôle encore plus actif en aidant Abou Dhabi à contrer l’élargissement du conflit yéménite contre les Émirats arabes unis. Un élargissement lié au grand dossier iranien car les rebelles houthis, qui en l’espace d’une semaine, ont frappé à deux reprises avec des missiles et des drones des cibles dans la capitale des Émirats arabes unis, reçoivent des composants militaires des Pasdaran comme ils font partie du réseau de milices que Téhéran maintient lié à lui-même en tant que vecteur d’influences régionales.

La question émiratie touche aussi l’Iran car le royaume du Golfe, ainsi que l’Arabie saoudite, ont engagé des contacts avec Téhéran en vue d’une détente pragmatique des relations. Abou Dhabi a activé une multitude de mesures militaires et diplomatiques pour pousser les Houthis à se mettre à la table des négociations. Le tableau de l’ensemble de la situation régionale comprend également l’arrivée dimanche du président israélien, Isaac Herzog, dans la capitale des Émirats : il s’agira de la première visite officielle d’un président israélien dans le pays. Le dossier iranien, donc celui de la sécurité-renseignement-défense, sera sur la table des réunions autant que celles liées aux affaires.

Pendant ce temps, des responsables israéliens et américains ont fait savoir qu’il y eu des discussions bilatérales sur l’état des pourparlers à Vienne, où ils tentent depuis des mois de trouver un terrain d’entente pour recomposer le JCPOA, signé en 2015 sous l’administration Obama, plongé dans une crise en 2018 lorsque l’administration Trump a décidé de sortir unilatéralement et maintenant, Joe Biden tente de le remettre en service – mais sans précipitation ni concessions excessives. De l’accord passe une partie de l’architecture de sécurité régionale, à savoir, la Méditerranée élargie.

La réunion stratégique américano-israélienne s’est déroulée par visioconférence, sur un canal « sécurisé », est-il précisé. Une précision nécessaire si l’on considère que l’Iran a également acquis d’excellentes compétences en matière de cyber, et que ces conversations pourraient faire l’objet des intérêts d’autres acteurs comme la Russie et la Chine, faisant partie du système de négociation qui a produit le JCPOA, et désormais intéressées à trouver des profits dans le contexte de la confrontation des puissances avec les États-Unis et l’Union européenne.

Les responsables de l’administration Biden ont fixé fin janvier ou début février comme date limite officieuse pour les pourparlers, parce qu’ils pensent que les progrès nucléaires de l’Iran rendront bientôt inefficace l’accord de 2015. La date limite marquera probablement un élan sur la décision américaine sur ce qu’il faut faire avec l’Iran ; décision qui impliquera inévitablement les alliés.

Les progrès à Vienne ont été modestes et très lents, souligne Emmanuel Rossi, mais le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian a fait allusion à la possibilité de pourparlers directs avec les États-Unis plus tôt cette semaine. Les contacts s’effectuent, à l’heure actuelle, sous un format indirect, où un relais diplomatique animé par des fonctionnaires européens chargés de transmettre les documents et les positions verbales entre les deux délégations. Abdollahian déclare que si cela s’avère nécessaire pour assurer « un bon accord », il est ouvert à des discussions en face à face.

Il s’agirait d’un changement significatif dans la position iranienne, qui jusqu’à présent a voulu éviter les contacts directs aussi pour marquer une distance avec Washington dans le récit avec lequel il raconte à ses citoyens ce qui se passe autour du JCPOA. Le porte-parole du département d’État a utilisé la déclaration de l’Iran à son avantage, soulignant que l’administration Biden faisait pression depuis un an en faveur de pourparlers directs. M. Price a déclaré qu’une communication plus efficace était nécessaire car « il nous reste très peu de temps ».

Dans l’ensemble, il existe un point que les responsables israéliens font valoir à Ravid : même après les pourparlers stratégiques en cours, ils restent préoccupés par le fait que la crise ukrainienne détournera l’attention internationale de la crise nucléaire iranienne et rendra plus difficile la coopération entre les États-Unis et la Russie sur cette question.

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