Explosion au-dessus de la centrale nucléaire de Natanz et tensions autour du JCPOA

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(Rome, Paris, 05 décembre 2021). L’Iran affirme avoir testé le système de défense aérienne autour de la centrale nucléaire de Natanz. Téhéran, veut-il montrer qu’il est prêt pour un éventuel Plan-B si les négociations du JCPOA échouent ?

Comme le rapporte Ferruccio Michelin dans le quotidien «Formiche», une forte explosion et un flash lumineux ont été ressentis dans la nuit de samedi à dimanche 5 décembre à Badroud, dans le centre nord de l’Iran. Lorsque de telles choses se produisent sur le territoire de la République islamique, il faut toujours penser à un sabotage quelconque, surtout dans la situation actuelle : Badroud est situé non loin de Natanz, la capitale du shahrestān (du même nom), où se trouve une centrale nucléaire dans laquelle les Iraniens effectueraient des processus d’enrichissement d’uranium.

Toutefois, alors que des rumeurs circulaient sur les réseaux sociaux, des responsables de la sécurité iranienne ont déclaré à la télévision d’État que l’explosion était un test de réaction rapide du système de défense antimissile ; ils ont confirmé ce que de nombreux iraniens (et observateurs) ont immédiatement signalé, qu’il s’agissait du résultat d’une explosion contrôlée lors d’un exercice. Ces déclarations, dans le cas de l’Iran, peuvent être aussi réelles que déformées. Déjà dans d’autres circonstances, les autorités ont tenté de détourner l’attention lorsque des infrastructures telles que Natanz ont été attaquées par des missions de sabotage – qui sont principalement menées par des agents infiltrés du Mossad.

Le programme nucléaire iranien a toujours été la grande préoccupation de la région du Moyen-Orient, et alors que les négociations pour recomposer l’accord de 2015, le JCPOA, se poursuivent, il existe toujours des plans B plus ou moins opérationnels (sous une forme clandestine), pour bloquer le processus que Téhéran mène. Il s’agit notamment de la possibilité d’actions cinétiques ou cybernétiques contre les installations, mais aussi la déstabilisation constante par le biais de sabotages qui, d’un point de vue pratique, ont pour objectif d’endommager et donc de ralentir le programme, et d’un point de vue psychologique, de mettre l’Iran sous pression.

La République islamique utilise généralement trois formes de réaction. La première, consiste à minimiser ou nier les attaques, car le fait d’être frappé sur son propre territoire ne s’adapte guère au message de force que le régime veut envoyer (et pire serait dans des moments comme celui-ci, où des milliers de manifestants protestent contre le gouvernement à propos de la crise de l’eau à Ispahan, à quelques dizaines de kilomètres au sud de Natanz). La seconde consiste à prendre des positions défensives visant à dénoncer les attaques et démontrer que les iraniens sont constamment attaqués.

La troisième, poursuit Ferruccio Michelin, implique d’autres acteurs tels que les différentes milices chiites qui sont liées par divers fils aux Pasdaran ; des groupes armés qui ont pénétré les systèmes socio-économiques et politiques de plusieurs pays de la région (Irak, Syrie, Liban, Afghanistan) et qui ont en leur sein des factions prêtes à des actions sans scrupules. Ce matin, la base américaine en Syrie d’al Tanf aurait été attaquée par des roquettes Katyusha selon l’agence syrienne Sana, mais les porte-parole de la Coalition internationale anti-EI ont nié avoir subi des attaques.

Al Tanf a déjà fait l’objet de représailles, tout comme l’ambassade américaine à Bagdad ou dans certains cas, le trafic commercial dans le Golfe, confiées à des milices – et parfois organisé de manière indépendante par des milices. Le contexte temporel est particulier : le septième round de pourparlers du JCPOA s’est achevé et la délégation envoyée par la nouvelle présidence conservatrice iranienne a tenu des positions extrémistes mais a obtenu peu, sinon une ligne sévère partagée par tous les interlocuteurs. Il peut y avoir des flambées de tensions, une démonstration de force pour se montrer capable de réagir à des attaques comme celui que pourrait subir Natanz si un point de rupture dramatique est atteint. L’usine est construite sous une montagne pour résister aux bombardements, c’est pourquoi cet exercice est particulièrement significatif, lié aux options dures qui restent entre les mains des États-Unis comme l’utilisation de bombes de type MOAB («Massive Ordnance Air Blast Bomb», à effet de souffle massif, ndlr).