Biden lance la nouvelle guerre froide et prouve que le défi à Pékin est une priorité

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(Rome, 17 septembre 2021). Le président n’a nullement abandonné l’Asie, comme on le craignait à la suite de son retrait d’Afghanistan. Mais il laisse l’Europe sur la touche

Dans les jours dramatiques du retrait indécent de Kaboul, le verdict unanime sur la gestion de la crise par les Américains avait dépassé les limites du mépris. Comme le décrit Roberto Fabbri dans son analyse dans le quotidien «Il Giornale», l’Amérique, disait-on, se rendait sans dignité et abandonnait à leur sort des innocents auxquels elle avait promis protection. Et surtout, Joe Biden prouve qu’il n’a aucune vision, qu’il est un vieil homme fatigué sans colonne vertébrale qui va conduire son pays vers un déclin inexorable. Personne (ou presque) n’a fait l’effort de regarder un peu au-delà de l’Afghanistan, et peut-être quelques semaines plus loin. Plutôt qui se souviendrait qu’il y a (qu’on le veuille ou non), une continuité dans la récente politique étrangère des Etats-Unis en Asie : de même qu’hier, Biden n’a fait que prendre le choix de Donald Trump de se laver les mains de l’Afghanistan en le rendant aux talibans (et non simplement en retirant les troupes américaines), ne fait aujourd’hui que poursuivre avec quelques ajustements la politique d’endiguement de la Chine que le rival républicain avait initiée à la fin de son mandat.

Certains se souviendront qu’il y a un an, le secrétaire d’État Mike Pompeo s’était rendu dans la région indo-pacifique. Il était allé en Inde, en Australie et au Japon pour envoyer un message clair : l’Amérique est là pour construire une alliance défensive avec vous contre la Chine. Une alliance militaire inédite baptisée Quad, dont les premiers pas se sont concrétisés par des manœuvres conjointes dans les mois qui ont suivi, mais aussi une entente stratégique et économique pour contenir la volonté hégémonique de plus en plus évidente de Pékin dans la région. Un message qui n’a pas plu au Parti communiste chinois, et c’est ce même message qui a été transmis entre-temps avec le soutien actif de Londres qui s’est concrétisé ces derniers jours par l’annonce de la naissance de l’«AUKUS», la nouvelle triple alliance qui rassemble les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l’Australie et rejoint le Quad susmentionné.

En bref, l’Amérique ne se retire pas de l’Asie, ajoute Roberto Fabbri. Au contraire, elle révise ses priorités, mettant le bras de fer avec la Chine au premier plan. Reste à savoir si le probable abandon de l’Afghanistan aux mains de Xi Jinping était une bonne idée. Mais en attendant, il est évident que le défi lancé par Pékin avec son expansionnisme en mer de Chine méridionale, avec la répression à Hong Kong et au Xinjiang, avec les menaces ouvertes d’invasion de Taiwan, avec la prise pour cible de l’Australie qui dénonce l’espionnage systématique chinois et les actes d’intimidation aux frontières avec l’Inde, a été relevé à Washington. Biden a clairement indiqué que l’avenir du monde dépendait de la liberté dans la région Indo-Pacifique, suscitant la colère de Pékin.

Il est légitime de s’interroger à quoi va aboutir ce tournant historique, qui laisse une nouvelle fois les alliés européens au second plan et qui voit, entre autres, le probable retour irréaliste de Londres à un rôle de premier plan au niveau mondial. Boris Johnson, répondant à l’ancienne Première ministre inquiète Theresa May, a déclaré que Londres « reste déterminé à défendre le droit international et donnera ce conseil ferme à ses amis du monde entier mais aussi à Pékin ». Une référence claire à la volonté de contribuer aux patrouilles navales américaines dans la mer sur laquelle Xi prétend illégalement imposer la souveraineté chinoise. Mais aussi dans l’éventualité de participer à la défense de Taiwan dans un avenir plus ou moins proche. Entre-temps, le 24, Joe Biden rencontrera les autres dirigeants du Quad : le défi à la Chine est lancé.