L’homélie de Monseigneur Hanna Rahmé et le discours de Samir Geagea tracent la feuille de route pour le «nouveau Liban»

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(Beyrouth, 05 septembre 2021). Comme prévu, ce dimanche 05 septembre fut une journée historique pour le peuple souverain du Liban, malgré ses souffrances imposées par des dirigeants décidés à tout détruire pour continuer à régner sur des ruines. La messe solennelle annuelle, présidée par le représentant du Patriarche, l’évêque de Baalbek-Deir el-Ahmar, Monseigneur Hanna Rahmé, a honoré les martyrs de la Résistance libanaise, tombés pendant la guerre de 1975-1990, mais aussi les martyrs tombés dans des actes terroristes depuis 1992 (oppression sous l’occupation syrienne et du Hezbollah, explosion du port, explosion de Tleil…). Dans son homélie, le prélat n’a pas mâché ses mots. Il a dressé un parallèle entre Jésus Christ qui s’est sacrifié pour libérer son peuple du pêché et les Libanais qui meurent tous les jours pour que les dirigeants restent au pouvoir. Pour lui, il vaut mieux que le dirigeant meurt pour que vive le peuple.

Une homélie incendiaire de Monseigneur Hanna Rahmé qui résume l’état d’esprit de 5 millions de Libanais

L’évêque Hanna Rahmé, à l’instar de tous les religieux, côtoie la population damnée par une situation dramatique et connait, de ce fait, l’état d’esprit des Libanais. En connaissance de cause, il a exprimé tout haut ce que pensent les Libanais tout bas. Son homélie était incendiaire et sans concession avec les responsables de cette descente en enfer. Il a invité les Libanais à une « révolution générale électorale » qui balayera la classe politique dirigeante actuelle et permettra aux futurs dirigeants, clairvoyants, propres et honnêtes, de relever le pays.

Après les propos très applaudis du prélat, et à la fin de l’office religieux, ce fut au tour de Samir Geagea, chef du parti des Forces Libanaises, de prendre la parole et de dévoiler sa feuille de route. Les Libanais ont relevé plusieurs points forts:

  • Geagea a rappelé aux Hirak du 17 octobre que les Forces Libanaises étaient, sont et resteront au cœur de la révolution. Elles en sont la colonne vertébrale. Il a mis en garde contre le discours « Tous pourris » (Kelloun yaani kelloun) qui met dans le même sac les corrompus et les honnêtes et qui, de ce fait, divise et fragilise le Hirak. Cet appel est synonyme d’une main tendue aux révolutionnaires en vue des législatives, mais aussi d’un avertissement lancé dans deux directions: sans les Forces Libanaises, le Hirak est condamné à disparaitre et avec les Forces Libanaises, la révolution se poursuivra.
  • Geagea a adressé un vibrant appel au « peuple du 14 mars », l’Alliance souverainiste qui a perdu tant d’occasions depuis le retrait de l’occupation syrienne en 2005. Sans le citer, Geagea a reconnu les erreurs de Saad Hariri qui a dilapidé la majorité législative issue des élections de 2005 et de 2009 et a préféré les concessions puis la soumission. A ces souverainistes, Geagea a rappelé que le Parti des Forces Libanaises restera le moteur de cette alliance, tout en rassurant que la révolte pacifique qui a forcé la puissante armée d’Assad à quitter le Liban sera capable de libérer le pays des autres occupations, et notamment du Hezbollah.
  • A juste titre, Geagea s’est adressé aux Chiites libanais, pris en otage par ce Hezbollah pour le compte de l’Iran, les invitant à se révolter contre l’humiliation que leur impose cette organisation idéologique transfrontalière: « les Chiites libanais ne sont pas censés mourir par centaines ou par milliers en Syrie pour que le régime Assad survive. Qu’ont-ils à gagner en vivant dans la détresse qui résulte de la politique du Hezbollah? Geagea a rappelé que les Chiites libanais sont une composante essentielle du Liban et leurs ancêtres se sont battus pour édifier le Grand Liban. Il est temps qu’ils se révoltent. Il a rappelé que la « résistance » ne survit pas que par les armes et l’idéologie, en rappelant que l’Union soviétique s’était effondrée en 1990 malgré sa puissance militaire et son idéologie.
  • A l’ensemble du peuple libanais, Geagea a admis une part de responsabilité dans l’élection de Michel Aoun à la présidence de la République, non sans regret. Et à ce titre, il a affirmé que la sortie de crise passe nécessairement par une élection présidentielle anticipée, pour écourter les souffrances. Car, a-t-il insisté, « le bateau a besoin d’un capitaine capable de le diriger et non pas d’un pirate qui le prend en otage pour ses propres intérêts ».

La feuille de route de Samir Geagea comporte ainsi un calendrier précis: des législatives destinées à modifier la majorité parlementaire, suivies des présidentielles anticipées, et la formation d’un gouvernement de spécialistes capables de redresser la situation, de rétablir la confiance avec le peuple libanais, mais aussi avec les partenaires étrangers, et une conférence nationale chapeautée par le futur président consacrée au désarmement du Hezbollah.

Alors que tous les souverainistes, de toutes les confessions, applaudissaient l’homélie de l’évêque Hanna Rahmé et le discours de Samir Geagea, quelques « nains de la politique » se sont lâchés sur les réseaux sociaux pour dénoncer la position de l’Eglise et la feuille de route de Geagea qu’elle a bénie. Mais ni ces critiques, ni les manœuvres de Michel Aoun et de son gendre Gebran Bassil, ni le risque de réactions violentes du Hezbollah n’ébranlent la détermination des souverainistes à recouvrer leur liberté et la souveraineté du Liban, et l’événement de ce dimanche en était la preuve.

Sanaa T.