(Rome, 04 septembre 2021). Les thèses sur la conversion des talibans en «bons», sur leur volonté de s’affranchir du terrorisme et sur l’hypothétique défaite de ce dernier s’avèrent être une pieuse illusion alimentée par l’administration Biden pour tenter de justifier le désastre afghan. C’est ce que suggèrent à la fois l’attaque d’hier en Nouvelle-Zélande, revendiquée par l’Etat islamique, et les révélations de la même organisation selon lesquelles l’auteur du massacre à l’aéroport de Kaboul, qui a fait 170 morts dont 13 marines américains, avait été libéré de prison par les mêmes talibans quelques heures seulement avant la conquête de la capitale. Commençons par Aukland : Selon l’analyse de Gian Micalessin, dans le journal «Il Giornale», le retour sur le terrain d’un « loup solitaire » armé d’un couteau démontre ce que tout le monde craignait déjà. La victoire des talibans, loin d’être un événement isolé, s’est déjà transformée en un puissant catalyseur capable de réveiller une galaxie djihadiste assommée par les défaites de Mossoul et de Raqqa. L’histoire du kamikaze de l’aéroport explique, en revanche, combien est infondée la prétention d’évaluer, avec une rationalité toute occidentale, l’opposition entre Al-Qaïda, les talibans et l’État islamique.
Ces contrastes, bien que capables de pousser les différentes factions à l’affrontement armé, n’entravent ni n’empêchent ce phénomène de vases communicants qui pousse les militants et les chefs de file de la mouvance à transiter d’un camp à l’autre de la panoplie djihadiste. Al Baghdadi, fondateur de l’État islamique et du califat avait été le chef d’Al-Qaïda en Irak. Al-Qaïda, en revanche, n’hésite pas à saluer avec enthousiasme la victoire des talibans en Afghanistan en reconnaissant à leur chef spirituel Hibatoullah Akhounzada le titre, tout sauf honorifique, d’Amir al-Mou’minin (en arabe : أمير المؤمنين), ou émir des croyants. C’est précisément de ce titre qu’Akhounzada semble tirer une sorte d’autorité transversale capable de s’étendre de la galaxie talibane aux franges terroristes cachées sous le chapeau d’Al-Qaïda. Et il en va de même pour l’EI. L’histoire d’Abdoul-Rahman al-Logari, le kamikaze responsable du massacre aux portes de l’aéroport de Kaboul, est à cet égard très emblématique, ajoute M. Micalessin.
Jusqu’au 15 août, jour de la conquête de la capitale par les talibans, Logari était l’un des 4 mille hôtes de Pul I-Charki, la prison située aux portes de la capitale où étaient retenus les militants talibans, les criminels de droit commun et les terroristes d’Al-Qaïda et de l’EI. Ce sont les talibans en route vers la capitale, qui les ont tous libérés, sans distinction de bande ou de faction. Renvoyant ainsi à l’EI une force de plusieurs centaines de combattants. Cela a été relaté dans une publication en ligne par l’Etat islamique lui-même. « Après la fuite des forces gouvernementales, Abdoul-Rahman al-Logari et plusieurs autres – dit le blog djihadiste – se sont évadés de prison et se sont précipités vers leurs frères pour perpétrer l’attentat suicide ».
Mais derrière l’action du mouvement taliban qui a non seulement libéré ses «rivaux», il a plutôt redynamisé leurs capacités opérationnelles, se cache une foi djihadiste commune, prête à tout pour s’opposer à un gouvernement allié aux « infidèles » occidentaux. Pour cette raison, il est absolument vain de se leurrer sur le fait que les talibans respecteront les accords conclus à Doha en dénonçant ou en bloquant les militants de groupes terroristes prêts à utiliser l’Afghanistan comme base pour de nouvelles attaques contre l’Occident. Une attitude déjà vue il y a 20 ans lorsque le mollah Omar et ses hommes ont préféré être anéantis plutôt que de livrer aux américains l’allié et ami Oussama Ben Laden.