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L’attaque du Hezbollah contre Israël: ce qui s’est passé le 12 juillet 2006

(Rome, 12 juillet 2021). La frontière entre Israël et le Liban est l’une des plus chaudes au monde. C’est une frontière entre deux états qui ne se reconnaissent pas, entre deux mondes qui peinent à communiquer entre eux. Cependant, le 12 juillet 2006, le climat est serein. Même dans ces régions, cela ressemble à une journée d’été ordinaire. Le long de la côte, les eaux de la Méditerranée ne sont pas agitées et dans les collines de Galilée, la vie se déroule normalement. Pourtant, aux premières heures du matin, l’enfer se déchaîne. A 9h00, une série de roquettes sont tirées du territoire libanais vers celui d’Israël.

À première vue, comme le rapporte Mauro Indelicato dans «Inside Over», une énième escarmouche apparaît entre l’armée de l’État hébreu et le Hezbollah, le mouvement chiite enraciné dans le sud du Liban. Peu de temps après, on a appris une incursion armée de miliciens chiites en territoire israélien. Et c’est ainsi que le monde apprend le début d’une nouvelle guerre au Moyen-Orient.

L’attaque du Hezbollah

Vers 9h00 dans le nord d’Israël, les alarmes antiaériennes commencent à retentir. La population est prise de court. Peu de gens s’attendaient à ce moment-là à des tirs de roquettes du côté libanais de la frontière. Certains missiles atteignent le territoire de Zar’it, un petit village frontalier, tandis que d’autres tombent sur la ville de Shlomi.

Le Hezbollah avait menacé Israël quelques mois plus tôt. Son chef, Hassan Nasrallah, avait déclaré vouloir agir pour faire rentrer chez eux certains prisonniers de son mouvement. Les lancements de fusées ne sont que le premier signe de la mise en œuvre de son intention. Des missiles Katyusha sont utilisés, dont certains ont également touché des fermes et des bâtiments résidentiels. Ces premières bombes ne sont toutefois qu’une diversion. En fait, le Hezbollah, ayant obtenu l’état d’alerte aérienne israélienne le long de la frontière, dispose d’une plus grande marge pour attaquer également par voie terrestre.

Vers 10h00 un commando du mouvement libanais pénètre en territoire israélien dans la zone de Zar’it, le premier à être touché par des roquettes. Les miliciens frappent deux chars israéliens et le premier bilan pour l’Etat hébreu est très lourd : trois soldats sont tués, deux ont été blessés et deux autres se sont faits prisonniers. Les noms de ces derniers sont Ehud Goldwasser et Eldad Regev. L’objectif du Hezbollah est de faire le plus de prisonniers possible afin de procéder à des échanges avec les Israéliens.

La nouvelle du raid de la milice est un choc pour Israël, mais aussi pour le Liban. Depuis Beyrouth, le Premier ministre Fouad Siniora s’empresse de dire que son gouvernement n’est pas au courant des démarches mises en œuvre par le Hezbollah, présent dans l’exécutif avec certains ministres. Selon la reconstruction du gouvernement libanais, le mouvement du parti chiite est imputable à la seule volonté des miliciens. Nasrallah en effet peu après, revendique l’action et donne un nom à l’opération en cours : « Promesse fidèle – en arable : الوعد الصادق ». La référence est clairement liée aux « promesses » de quelques mois plus tôt. (NDLR, mais le 28 août 2006, Hassan Nasrallah admet que s’il avait su que l’enlèvement de deux soldats israéliens survenu le 12 juillet allait provoquer un conflit de 33 jours avec Israël, il ne l’aurait pas fait,«…لو كنت أعلم ….»).

La réponse israélienne

Partout dans le monde, ajoute Mauro Indelicato, les nouvelles de la frontière entre Israël et le Liban ont fait écho immédiat. La une, occupée quelques jours plus tôt par la victoire de l’Italie au Mondial 2006 en Allemagne, s’ouvre désormais sur les tensions au Moyen-Orient. Si les autorités militaires israéliennes prévoient déjà des ripostes sévères aux attaques à la roquette, une incursion terrestre prend aussitôt des allures de déclaration de guerre. À la tête du gouvernement à l’époque se trouve Ehud Olmert. Représentant de Kadima (le parti fondé en 2005 par Ariel Sharon avant les ennuis de santé de ce dernier), le Premier ministre ne jouit pas d’une grande popularité et n’a pas le charisme de son prédécesseur. Son leadership n’est pas aussi fort et pour cette raison, que beaucoup doute de sa réelle capacité à répondre au Hezbollah. Son ministre de la Défense est également considéré comme « faible ». Il s’agit d’Amir Peretz, chef du parti travailliste, à qui l’opinion publique aurait peut-être confié un ministère économique mais pas le plus important en cas de guerre.

Le Conseil des ministres se réunit en urgence quelques heures après les premiers tirs de roquettes. Olmert et Peretz reçoivent alors le mandat d’élaborer un plan militaire en territoire libanais. Quelques heures avant la tenue du Conseil, l’armée israélienne avait pourtant déjà commencé à tirer les premiers coups d’artillerie sur les positions du Hezbollah. Le communiqué publié à l’issu de la réunion du gouvernement est claire : « Israël répondra de manière agressive et sévère à ceux qui ont perpétré et qui sont responsables de l’action d’aujourd’hui.

De cette manière, on peut dire que la guerre a déjà commencé. Dans le nord du pays, les habitants commencent à déplacer leurs effets personnels dans des bunkers, où ils semblent destinés à vivre plusieurs jours. Au sud du Liban, la population tente de trouver un abri dans des lieux de fortune. A la fin de cette journée, en effet, les tirs fusent des deux côtés : Israël bombarde le territoire libanais et le Hezbollah continue de lancer des roquettes en direction de l’Etat hébreu. Deux protagonistes de cette journée ne verront malheureusement pas la nuit : Ehud Goldwasser et Eldad Regev, les deux soldats faits prisonniers dans la matinée, meurent quelques heures après l’embuscade.

Une guerre courte mais sanglante

Le 12 juillet 2006 marque la fin de la grande illusion de paix de 2005, année au cours de laquelle le Premier ministre israélien de l’époque, Ariel Sharon, a évacué les colonies de la bande de Gaza, ouvrant la voie à de nouveaux scénarios. Cependant, il tombe malade quelques mois plus tard. Dans les territoires palestiniens, le Hamas remporte plus tard les élections législatives et la situation redevient tendue.

Le 25 juin 2006, depuis la bande de Gaza, un commando a kidnappé le soldat israélien Gilad Shalit, une véritable anticipation de ce qui s’est passé le 12 juillet suivant, poursuit Mauro Indelicato. La guerre qui se déclenche au cœur de l’été éteint définitivement tout enthousiasme. Le conflit dure un peu plus d’un mois et se termine le 17 août par un cessez-le-feu. Il était douloureux pour les deux parties. Plus d’un millier de civils meurent en territoire libanais, 43 en territoire israélien avec plus de 4.000 blessés. Des dégâts incalculables dans les villes du sud Liban et dans les infrastructures des deux pays concernés. Un conflit «estival» qui ne fait ni vainqueur ni vaincu et dont les signes sont encore évidents aujourd’hui.

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