(Rome, 07 avril 2021). La guerre sombre et de faible intensité entre l’Iran et Israël se poursuit dans les mers. Un cargo iranien considéré comme une base d’opérations des Pasdaran, le MV Saviz, a été endommagé lors de la traversée de la mer Rouge par une attaque israélienne. La nouvelle a été confirmée à la fois par les médias israéliens (un fait rare) et par la télévision d’État iranienne. Les États-Unis ont également été informés de l’attaque. Comme le rapporte le New York Times, un responsable américain a déclaré, tout en restant anonyme, qu’Israël avait notifié l’attaque à la marine américaine en l’annonçant comme un geste de «représailles» suite aux attaques en mer d’Oman contre un navire israélien et que d’autres épisodes se sont produits dans le golfe Persique. Selon des informations préliminaires, l’attaque a eu lieu à 07h30 heure locale. Le Saviz semble être endommagé sous la ligne de flottaison mais l’agence iranienne Tasnim a signalé la présence d’une mine. Un élément qui confirmerait la participation des commandos israéliens.
Pour le moment, les gouvernements des pays directement impliqués dans l’attaque n’ont pas confirmé les faits, mais ces informations publiées par les médias de la République islamique et de l’État hébreu aident à donner une image assez claire de l’histoire. L’agression aurait eu lieu au large des côtes de l’Érythrée, la zone où le navire iranien est amarré depuis de nombreux mois. Les premières rumeurs parlent d’une mine magnétique, ce qu’on appelle dans le jargon « mine de patelle » (un type de mine navale qui se fixe sur le côté d’un navire, généralement par un plongeur membre des forces spéciales, ndlr). L’appareil est placé via des aimants sur la cible, puis il est déclenché une fois que l’explosif est activé à distance. Une tactique souvent utilisée par les commandos israéliens et iraniens. Nombreux sont ceux qui se souviennent de la vidéo de l’attaque présumée des Pasdaran dans le golfe Persique, dans laquelle on voit un bateau appartenant aux Gardiens de la révolution placer l’explosif magnétique juste au-dessus de la ligne de flottaison d’un cargo.
Le bateau affecté représente l’une des clés pour comprendre la stratégie navale iranienne. Officiellement, il est enregistré comme navire marchand, mais beaucoup le définissent de « vaisseau mère » considéré comme une sorte de grande cellule mobile à partir de laquelle les Pasdaran mènent leurs opérations navales dans la région de la mer Rouge et du golfe Persique. En juillet 2018, le «Washington Institute for Near East Policy» l’avait qualifié de « navire de soutien » destiné à recueillir des renseignements qui ont ensuite été utilisés pour mener la guerre au Yémen contre le bloc dirigé par l’Arabie saoudite. Certaines images montrent des hommes en uniforme se déplaçant fréquemment sur le pont du navire marchand, tandis que d’autres sources parlent de hors-bords quittant le navire pour se diriger vers la côte yéménite.
Comme l’explique l’analyste HI Sutton pour Usni News, ce qui est particulièrement intéressant pour comprendre l’utilisation de ce navire est le fait qu’il a très peu bougé depuis qu’il a été envoyé à la pointe sud de la mer Rouge. Pendant environ deux ou trois ans, le navire est resté pratiquement ancré au large du détroit de Bab el-Mandeb et n’a bougé que sur de très courtes distances. L’Iran affirme qu’il s’agit d’une mission de surveillance du trafic maritime dans le cadre de la lutte contre la piraterie. Mais il est clair que le concept peut être largement interprété en fonction de ce qui est considéré comme de la piraterie dans une zone où les attaques contre les navires se multiplient et où des cargos liées à la fois à l’Iran et à Israël sont souvent impliqués.
L’escalade de ces dernières semaines montre que cette guerre de l’ombre n’a jamais cessé. Depuis que le Wall Street Journal a publié une enquête révélant des dizaines d’attaques israéliennes en Méditerranée contre des cargos iraniens transportant du pétrole vers la Syrie – un stratagème pour contourner les sanctions contre Damas – la guerre souterraine dans la mer Rouge, le golfe Persique et la mer d’Arabie s’est enflammée et est devenue une forme de notoriété publique. Au cours des derniers mois, avant cette dernière attaque contre le Saviz, des attaques ont eu lieu contre le Mv Helios Ray israélien dans le Golfe Persique et contre le Lori qui faisait route de la Tanzanie vers l’Inde. Après l’incident de Suez, cette nouvelle attaque dans un autre point, Bab el-Mandeb, ramène à l’attention du monde le problème de la mer Rouge quant au passage des navires marchands. Et pendant ce temps, l’Iran et les États-Unis négocient à Vienne un retour de Washington à l’accord sur le programme nucléaire iranien.
Lorenzo Vita. (Inside Over)