Elle avait été condamnée pour « diverses activités prohibées par la loi antiterroriste ».
Après quasiment trois années passées en prison, la militante féministe saoudienne Loujain Al-Hathloul a été libérée, a annoncé mercredi 10 février sa famille. « Loujain est à la maison après 1.001 jours passés en prison », s’est réjoui sur Twitter sa sœur Lina Al-Hathloul. Loujain Al-Hathloul, 31 ans, avait été condamnée le 29 décembre à cinq ans et huit mois de prison après avoir été reconnue coupable de « diverses activités prohibées par la loi antiterroriste », selon des médias locaux. La peine comprenait un sursis de deux ans et dix mois « à condition qu’elle ne commette pas de nouveau crime dans les trois ans », et sa famille avait bon espoir qu’elle soit libérée d’ici mars. Diplômée de l’Université canadienne de Colombie britannique (UBC), elle avait été arrêtée, avec d’autres militantes, en mai 2018, peu avant la levée de l’interdiction de conduire faite aux Saoudiennes, pour « tentative de déstabilisation du royaume ». La presse saoudienne avait qualifié ces militantes de « traîtres », pour avoir entretenu des contacts avec des diplomates et ONG étrangers.
Cette Saoudienne familière des réseaux sociaux avait déjà été arrêtée fin 2014 et placée en détention pour avoir tenté d’entrer en Arabie saoudite au volant d’une voiture en provenance des Emirats arabes unis. Elle en était sortie soixante-treize jours plus tard, après une campagne internationale.
La famille de Mme Hathloul affirme que celle-ci a été victime en détention de harcèlement sexuel et de torture. La militante a raconté, selon sa famille, que l’ancien conseiller royal, Saoud Al-Qahtani, avait menacé de la violer et de la tuer, ce que nient vigoureusement les autorités. En 2020, elle avait observé une grève de la faim après s’être vu refuser le droit d’appeler ou de rencontrer ses proches pendant des mois, selon son entourage. Elle y avait mis fin après que ses parents eurent pu finalement lui rendre visite.
« La libération de Loujain Al-Hathloul après une terrible épreuve en prison en Arabie saoudite, qui a duré près de trois ans, est un soulagement incroyable », a déclaré Lynn Maalouf, d’Amnesty International. « Rien ne peut rattraper le traitement cruel qu’elle a subi, ni l’injustice de son emprisonnement », selon l’ONG.
Les Etats-Unis ont salué la libération de la jeune femme, soulignant qu’elle n’aurait jamais dû être emprisonnée. « Il est certain que sa libération est une étape bienvenue, a affirmé le porte-parole du secrétariat d’Etat américain, Ned Price. Promouvoir les droits des femmes et les autres droits humains ne devrait jamais être criminalisé ». La libération de la militante intervient à un moment où l’Arabie saoudite craint de voir ses relations avec les Etats-Unis changer. Le président américain, Joe Biden, a en effet promis de réévaluer le partenariat américano-saoudien et de défendre les droits de l’homme et les principes démocratiques. Lors de sa campagne présidentielle, M. Biden a promis d’inverser la politique de l’ancien président Donald Trump, qui consistait selon lui à donner à l’Arabie saoudite « un chèque en blanc pour poursuivre un ensemble de politiques désastreuses », y compris la répression des militantes féministes. (Le Monde)