Liban: les USA mettent en garde la France contre le Hezbollah

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(Roma 16 septembre 2020). Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo s’est adressé à la France mercredi 15 septembre, l’avertissant que ses efforts pour résoudre la crise au Liban seront vains si la question de l’armement du Hezbollah, le groupe chiite soutenu par l’Iran, n’est pas immédiatement abordée.

Le président français Emmanuel Macron dirige les efforts internationaux pour mettre le Liban sur la voie de la réforme économique et du changement politique, après des décennies de corruption et de mauvaise gestion des finances publiques. Le Hezbollah joue et continuera de jouer un rôle clé dans la transition, étant l’une des principales forces politiques du pays du Moyen-Orient. Cependant, contrairement à Washington qui considère le groupe actif d’un point de vue militaire, comme une véritable organisation terroriste, Paris fait valoir que le bras politique du mouvement démocratiquement élu, a sa propre légitimité.

Le 8 septembre, les États-Unis ont étendu les sanctions imposées au Liban en inscrivant sur la liste noire deux anciens ministres du gouvernement, accusés de fournir un soutien matériel et économique au Hezbollah. Cette décision a soulevé des doutes sur la coordination entre les États-Unis et la France en ce qui concerne la situation au Liban et en présence de factions luttant pour la formation d’un nouvel exécutif.

« Les États-Unis ont assumé leur responsabilité et empêcheront l’Iran d’acquérir des chars chinois et des systèmes de défenses aériens russes et ensuite de vendre des armes au Hezbollah, torpillant ainsi les efforts du président Macron au Liban», a déclaré Pompeo mardi 15 septembre dans une interview à la radio France Inter. « Nous ne pouvons pas permettre à Téhéran d’acquérir plus d’argent, d’armes et de pouvoir et en même temps permettre au Hezbollah de se débarrasser des catastrophes qu’il a causées au Liban », a-t-il ajouté.

Le 1er septembre, lors d’une visite au Liban peu de temps après l’explosion du 4 août dans le port de Beyrouth, Macron a déclaré que les politiciens libanais avaient accepté de former rapidement un nouveau cabinet. Les responsables parisiens ont précisé que la priorité était de créer un gouvernement capable de mettre en œuvre des réformes rapidement, alors que les discussions sur les armes du Hezbollah ne sont pas une question urgente. Selon le quotidien français Le Figaro, en août, Macron a rencontré le chef du bloc parlementaire du Hezbollah, Mohammed Raad, et lui a parlé de la possibilité de se dissocier de l’Iran et de retirer ses forces de la Syrie voisine. La présidence française n’a pas officiellement confirmé la rencontre mais ne l’a pas démentie non plus. Ce serait la première fois qu’un leader français rencontre un membre du groupe. «C’est une arme à double tranchant pour Macron. Le Hezbollah fait partie du même système de gouvernance qui doit changer au Liban et je ne suis pas sûr que nous puissions parler d’un Hezbollah politique sans savoir comment gérer le Hezbollah armé », a déclaré une source diplomatique française.

Né en 1982 en tant que mouvement de résistance contre l’occupation israélienne du sud du Liban et plus tard devenu un parti politique local, le Hezbollah, qui signifie en arabe « le Parti de Dieu », est une organisation paramilitaire chiite libanaise que plusieurs pays, dont les États-Unis et Israël, considèrent comme un groupe terroriste. Le Hezbollah est un acteur clé dans l’arène politique libanaise (qui contrôle la totalité du pays, NDLR). Israël considère le mouvement chiite armé, soutenu par Téhéran, comme la plus grande menace pour le pays en dehors des frontières nationales. Le 15 octobre 2018, les États-Unis ont inclus le Hezbollah sur une liste de 5 groupes que le ministère américain de la Justice a désignés comme organisations criminelles transnationales, contre lesquelles Washington a préparé des enquêtes et des sanctions plus sévères.

Malgré de multiples sanctions dirigées contre le Hezbollah, Beyrouth continue d’être parmi les plus grands bénéficiaires de l’aide américaine et Washington est le principal partenaire sécuritaire du Liban. Depuis 2006, les États-Unis ont fourni plus de 1,7 milliard de dollars d’aide pour renforcer les capacités des forces armées libanaises à protéger les frontières du pays, contrer les menaces internes et défendre le pays. Cela passe également par la fourniture d’avions à voilure fixe et tournante, de munitions, de véhicules et d’opérations de formation conjointes.

Chiara Gentili. (Sécurité internationale)