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France- municipales : le gouvernement tranche pour un second tour le 28 juin. La campagne sera longue, très numérique et sans meetings

Le gouvernement a dévoilé la date retenue pour l’organisation du second tour. Près de 5.000 communes françaises et 16 millions d’électeurs sont concernés. Le port du masque sera obligatoire.

C’est bien le visage couvert d’un masque, rendu obligatoire pour l’occasion, que les Français iront voter le 28 juin. Ainsi en a décidé l’exécutif après avoir lu, avec attention, les préconisations du Conseil scientifique. Or celui-ci a donné son aval à reculons. Un oui, perlé de mais, bien peu encourageant. Les experts estiment qu’il est trop tôt pour juger de l’efficacité du confinement et donc pour se projeter à la fin juin. Mais le gouvernement n’avait guère de solution idéale. Repousser le scrutin au mois de septembre voir en janvier ou mars 2021, comme le suggéraient certains, impliquait de refaire les deux tours. Or, selon les experts, deux tours sont bien plus risqués qu’un seul d’autant que l’on ignore si le virus, qui pourrait bien être saisonnier, n’aura pas repris toute sa virulence en automne ou en hiver. Édouard Philippe a donc tranché sans réussir, lors de sa rencontre avec les chefs de partis politiques, à réunir un consensus. « Actuellement à Matignon au nom de France Insoumise à propos du second tour des municipales. J’ai exprimé notre désaccord total avec la tenue d’un vote fin juin. Le Comité scientifique a indiqué qu’il ne sera pas possible de faire campagne car dangereux. Pas de campagne, pas de vote », tweetait, mercredi, Alexis Corbière. L’idée de recourir au vote électronique, comme le suggère, depuis plusieurs jours, Rachida Dati, a été évoquée mais « la dématérialisation du vote n’est pas encore possible techniquement et le vote par correspondance, supprimé en 1975, l’a été pour cause de fraude électorale », a souligné, vendredi, Christophe Castaner qui a aussi prévenu que cette décision était réversible. « Il y aura une clause de revoyure dans deux semaines. Le 27 mai sera aussi présenté au conseil des ministres un décret prévoyant le report de ces élections municipales si jamais le conseil scientifique nous le préconise », a assuré le ministre de l’Intérieur. Toujours est-il que si le second tour a bien lieu en juin, il sera précédé d’une campagne inédite, sans meeting ni tractage. Le Conseil scientifique recommande aussi « le port du masque et d’une visière pour toutes les personnes participant à des opérations de campagne dans le souci de les protéger ». « La campagne du deuxième tour sera plus longue. Je fais confiance à l’inventivité des candidats pour faire passer leurs idées. Ils expliqueront autrement ce qu’ils veulent faire », a assuré, vendredi, Édouard Philippe.

Le résultat sera-t-il biaisé ?

Reste la question du résultat. Sera-t-il biaisé ou non par les conditions de tenue du vote et le contexte ? Comme ce fut le cas lors du premier tour, la participation risque d’être extrêmement impactée. Le taux d’abstention du premier tour s’est élevé à 53,5 % des inscrits, ce qui constitue un record pour des élections municipales. Selon un sondage Ipsos, la participation a varié en fonction des préférences politiques, avec 61 % pour les électeurs LREM-MoDem et 55 % pour ceux de la droite, mais seulement 40 % des électeurs RN et 44% de ceux de la gauche. Mais contrairement à ce que l’on pourrait penser, toujours selon cette enquête, ce sont les seniors qui ont le plus voté : 63 % des 70 ans ou plus, contre seulement 30 % des moins de 25 ans. En sera-t-il de même pour le second tour ? Les seniors, qui ont payé un lourd tribut à la crise, seront-ils plus prudents ? Le port du masque, rendu obligatoire, rassurera-t-il les Français ? Rien ne permet de faire de pronostic. En revanche, il est fort probable que le contexte influence fortement le choix des Français. Les maires sortants, qui ont été en première ligne tout au long de la crise, pourraient bien être avantagés d’autant que la campagne de leurs adversaires sera forcément minimaliste vue les conditions imposées par les règles sanitaires. À Paris, par exemple, Anne Hidalgo semble sortir renforcée alors qu’Agnès Buzyn, sa principale concurrente, reprend la campagne laminée. D’autre part, l’audience donnée, depuis le début de la crise du Covid, aux questions d’environnement, pourrait avantager les partis écologistes, qui avaient déjà le vent en poupe, à moins que le désir de stabilité des Français, toujours fort en période de crise, ne vienne encore conforter les sortants. Réponse dans cinq semaines. Louis Aliot, député RN des Pyrénées-Orientales et candidat aux municipales à Perpignan, a évoqué sur franceinfo le recours au « boîtage » (le fait de déposer des tracts dans des boîtes aux lettres) et aux coups de téléphone. L’accent peut être mis sur une campagne numérique, même rapide, car, pour lui, « la campagne électorale sur le fond des choses, c’est-à-dire le bilan des maires sortants et le projet de ceux qui aspirent à être maire de la mandature qui arrive, a déjà eu lieu ». Julien Bayou, d’Europe Ecologie-Les Verts, a annoncé sur BFMTV que son parti allait édicter « un cadre de bonne conduite » pour les candidats. Il a expliqué envisager d’organiser des meetings en visioconférence, mais aussi continuer à faire campagne dans l’espace public « avec le respect des consignes sanitaires ». Pour Eric Coquerel, député de La France insoumise, ces conditions empêchent de mener une vraie campagne. « M. Castaner a parlé de campagne numérique, mais ça, ça n’existe que pour les notables, a-t-il déploré sur BFMTV. La campagne, par essence, c’est d’aller voir les gens, de discuter, c’est de débattre. Il était urgent d’attendre le moment d’organiser deux tours classiques », a-t-il dit.

Un rythme de campagne plus diffus

D’habitude, la campagne du second tour des municipales dure cinq jours seulement. Avec un second tour le 28 juin, cette période sera étendue à plus d’un mois, soit une campagne avec « un peu moins d’intensité, mais beaucoup plus de durée », selon Edouard Philippe.

Cela devrait également bouleverser le rythme des alliances, alors que trois mois et demi sépareront les deux tours de l’élection. De fait, les candidats du premier tour auront eu beaucoup plus de temps pour débattre des possibles ralliements. A l’instar des discussions agitant l’équipe de Cédric Villani à Paris, dont une partie soutient une alliance avec LREM tandis que l’autre souhaiterait rejoindre Anne Hidalgo (PS). Les candidats auront jusqu’au 2 juin pour déposer leurs listes définitives. Pour Gaël Perdriau, maire Les Républicains de Saint-Etienne (Loire), cette décision du 28 juin était la bonne. « La campagne, elle a eu lieu. Chacun a pu rencontrer les habitants et exposer sa vision », a-t-il indiqué à BFMTV.

Inclure les électeurs dans cette campagne reste un enjeu important, comme le rappelle Sacha Houlié, député LREM de la Vienne. Dans un tweet, il estime que cette décision « appelle notre plus grande vigilance pour que le retour de la démocratie ne se fasse pas sans les électeurs ». (Médias/Agences/TV)

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