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Libye : l’UE lance une nouvelle mission méditerranéenne, «Irene» devra arrêter le trafic d’armes

L’Union européenne lance une nouvelle mission navale au large des côtes libyennes demain 1er avril. Né sur les cendres de l’opération Sophia : il s’appellera Irini, « paix » en grec, et aura pour tâche de faire respecter l’embargo sur les armes, imposé à la Libye, une décision prise par l’ONU qui n’a jamais été respectée par quiconque a voulu passer les armes aux milices libyennes.

Avec l’utilisation d’avions, de satellites et de navires, l’UE veut donc essayer d’arrêter l’afflux d’armes qui continuent d’alimenter le conflit en Libye. Le problème est que telle qu’elle est organisée, la mission ne peut avoir qu’un résultat concret, celui de bloquer l’approvisionnement de la Turquie au gouvernement de Tripoli, un gouvernement reconnu par l’ONU mais pratiquement abandonné à lui-même et à la protection, de fait, de la Turquie d’Erdogan. En fait, il sera impossible d’arrêter les armes dirigées contre le général Khalifa Haftar.

Irene peut effectuer des inspections en haute mer au large des côtes libyennes sur des navires soupçonnés de transporter des armes ou du matériel à destination et en provenance de la Libye, conformément à la dernière résolution des Nations Unies de 2016. Mais les armes à destination de la faction Haftar arrivent par avion des Émirats ou de pays de l’ex-URSS ou passent par voie terrestre, depuis la frontière égyptienne. Dans ce cas, Irene fera peu, sinon collectera des photos satellites et des informations de renseignement.

Une autre tâche consistera à collecter des informations sur le trafic illégal de pétrole et de produits raffinés : en Libye, le pétrole est subventionné par l’Etat, donc des millions de barils par an sont exportés illégalement et vendus sur les marchés africains mais aussi dans certains pays méditerranéens. Avec deux effets : le premier est de vider les caisses du gouvernement de Tripoli. La seconde consiste à remplir les coffres des trafiquants de pétrole qui sont ensuite liés à tout autre type de délit (trafic d’armes et de migrants d’abord).

Irene devra également « contribuer au renforcement des capacités et à la formation des garde-côtes libyens et de la marine aux activités d’application des lois maritimes », ainsi que la lutte contre les réseaux de traite des êtres humains par la collecte et la patrouille d’informations par les avions».

Reste donc le contraste avec l’immigration clandestine. Mais les tâches assignées par l’Union européenne à l’amiral qui commande la mission, le contre-amiral italien Fabio Agostini, sont précises. La mission ne doit pas « attirer » une nouvelle immigration illégale. Elle ne doit pas devenir une nouvelle opportunité commerciale pour les trafiquants. Dans les prochaines heures, les pays membres de l’Union affecteront des navires et des avions, permettant effectivement la restauration d’une activité qui n’avait pratiquement été suspendue.

Des sources à Bruxelles soulignent que dans l’éventualité où des navires militaires sauveraient des migrants, la Grèce a déclaré qu’elle était prête à être le port de débarquement pour les naufragés. Athènes a accepté la possibilité d’accueillir de nouveaux réfugiés en raison de l’importance politique qu’elle attache à l’embargo sur les armes. La Grèce veut arrêter l’expansion de la Turquie dans la Méditerranée orientale et maintenant centrale. Elle veut entraver les relations entre Tripoli et Ankara ; entre autres, les deux capitales ont récemment signé un accord pour la division du plateau continental (à des fins d’exploration des hydrocarbures) qui ne prend pas en compte les droits de la Grèce et notamment la présence de l’île de Crète dans le tronçon de mer entre la Libye et la Turquie.

Aujourd’hui, le ministre des Affaires étrangères de l’UE, Josep Borrell, commentant le lancement d’Irene, a déclaré que « malgré les appels internationaux à une trêve pour aider à contenir le coronavirus lancé par le secrétaire général des Nations unies, les affrontements en Libye ont augmenté ». « Nous ne pouvons pas nous permettre de mener deux guerres en même temps – a ajouté Borrell – nous devons consacrer toute notre énergie au confinement du coronavirus, donc l’opération Irene est également une contribution à ce combat ». (Médias-Presse)

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