Les prix du pétrole s’effondrent à l’ouverture des marchés. Une catastrophe pour les pays producteurs, les investissements et les producteurs de schiste

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Roma- Ce lundi 30 mars, les prix du pétrole brut se sont effondrés dans les marchés asiatiques, dans le sillage des marchés boursiers qui ont dévissé ce week-end, alors que la pandémie de coronavirus se répand sur tous les continents.

Le brut du Texas a ainsi perdu 3,5% par rapport à vendredi et s’échange à 20 dollars le baril, et le baril de Brent de la Mer du Nord a perdu 5,6% à 23 dollars le baril. Le pétrole revient ainsi au niveau de ses prix de 2003. Selon l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), aucune amélioration de la demande mondiale d’énergie n’est envisageable dans le contexte actuel pour pouvoir entrevoir une remontée des prix. D’une part, la pandémie n’a pas encore atteint son pic, d’autre part, la baisse des dernières semaines dans le sillage de la guerre des prix entre l’Arabie saoudite et la Russie a poussé les opérateurs à faire des stocks importants de brut. Or, la capacité de stockage a été atteinte et la demande s’est effondré par rapport à l’offre.

Les pays exportateurs s’inquiètent pour leurs revenus d’autant plus qu’aucune relance économique n’est attendue avant la fin de la crise sanitaire. Le premier semestre de l’année en cours aura ainsi été catastrophique pour leurs budgets, saignés à blanc par les dépenses imprévues induites par la pandémie et par ses conséquences économiques (récession locale et mondiale), sanitaires (coût des hospitalisations, importation de matériel médical et de médicaments) et sociales (chômage partiel, confinement, état d’urgence…).

Si certains plus gros producteurs comme l’Arabie saoudite et la Russie peuvent supporter une récession et une chute des prix et des recettes pendant quelques mois encore, en puisant dans leurs réserves, d’autres pays qui ont raté la diversification de leur économie comme l’Algérie, ou qui frôlent l’asphyxie comme l’Iran, l’Irak et le Venezuela, sont très inquiets. La compagnie pétrolière algérienne Sonatrach a ainsi annoncé, dimanche, une réduction de son budget en 2020 de 50% et le report de tous ses investissements, pour économiser quelque 7 milliards de dollars.

L’Irak, qui ne parvient pas à former un gouvernement, est au milieu de la tempête des prix et craint pour ses revenus dont une partie sert directement à soutenir l’Iran, selon les opposants de la main-mise iranienne sur la Mésopotamie. L’Iran, qui croule sous les sanctions, tente d’obtenir leur levée sous prétexte humanitaire en temps de crise sanitaire. Téhéran a déjà annoncé avoir récupéré une partie de ses avoirs bloqués en Occident (sans en préciser le montant). Rappelons que la République islamique avait menacé de détruire le secteur énergétique de ses adversaires si elle était elle même privée du sien. C’est ce que tentent de mettre en application les rebelles yéménites qui mènent régulièrement des attaques contre des cibles stratégiques saoudiennes, soit par drones, soit par missiles balistiques. La nuit dernière, ils ont revendiqué une série d’attaques contre des cibles sensibles à Riad, Abha, Jazane et Najrane, et promis de divulguer les détails dans les prochains jours. Cette attaque marque le début de la 6ème année de la guerre lancée par l’Arabie saoudite et sa coalition contre les Houthis et qui peine à atteindre le moindre objectif militaire ou stratégique face à l’Iran et à son influence au Yémen et dans toute la région.

La chute des prix des hydrocarbures menace les projets d’investissement. Comme la Sonatrach, tous les opérateurs mondiaux réduisent leurs budgets et les dépenses, tant dans l’exploration que dans le fonctionnement. Parmi les victimes collatérales de ces compressions des dépenses figure le Liban, qui a entamé la prospection dans ses eaux territoriales. Les autorités libanaises comptent en effet sur le potentiel gazier du pays pour sortir de la crise financière née du mariage entre l’incompétence des dirigeants des dernières décennies et leur grande corruption. Or, le Liban qui est déjà en faillite et très endetté, devra revoir ses plans avec l’ajournement des investissements dans les hydrocarbures.

La chute des prix pénalise aussi et surtout les producteurs américains du schiste, dont le coût de production est désormais largement supérieur au prix de vente. Si la courbe ne s’inverse pas rapidement, plusieurs compagnies seront contraintes à l’arrêt et la disparition. Outre les dégâts humains, le Covid-19 aura aussi provoqué une catastrophe économique et financière dans le monde au profit de la Planète.

Magdi W.