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Liban : l’indignité de la classe politique, à tout prix

Le Parlement libanais, élu en mai 2018 par 49% des électeurs, s’est réuni ce mardi 11 février 2020 pour voter la confiance au gouvernement de Hassan Diab, né au forceps après la démission du gouvernement de Saad Hariri, en octobre dernier. Le nouveau gouvernement est monocolore, censé rassembler des technocrates compétents. Mais au final, il regroupe des conseillers d’anciens ministres politiques et des personnalités proches du Hezbollah, du Parti syrien national et social qui prône la Grande Syrie, du Mouvement Amal et du Courant Patriotique Libre. En somme, c’est un gouvernement de défiance à l’égard du peuple libanais qui manifeste depuis le 17 octobre 2019. C’est aussi et surtout un gouvernement de confrontation avec la communauté internationale, car il représente un prolongement de l’Iran à travers son bras armé extérieur, le Hezbollah.

En lui accordant une courte confiance (63 voix sur 128 députés), les députés dont la légitimité est sérieusement ébranlée, non seulement par une loi électorale taillée sur mesure et par le taux d’abstention de 2018, mais surtout par des manifestations quotidiennes depuis le 17 octobre dernier, démontrent leur indignité. Pourtant, lors de son homélie du 9 février dernier, lors de la messe célébrant la fête de Saint Maroun, patron de la communauté maronite qui porte son nom, l’évêque maronite de Beyrouth Boulos Abdel Sater, a littéralement lessivé la classe politique dirigeante. « Ceux qui échouent dans les affaires publiques doivent démissionner. Ceux qui prétendre diriger doivent servir et non pas se servir… », leur a-t-il dit. Mais les présidents de la République (Michel Aoun), du Parlement (Nabih Berri) et du Gouvernement (Hassan Diab), assis en première loge, l’ont applaudi. Ou bien ils ont fait semblant de ne pas comprendre son message, ou, pire encore, ils ne se sentent pas concernés alors qu’ils ont ruiné le pays. Si Hassan Diab n’a pas encore rejoint le club des pilleurs, Aoun et Berri ont pillé le Liban ou ont laissé faire, en s’enrichissant au passage. C’est pour prendre sa part à ce festival que Hassan Diab a demandé la confiance, et c’est pour perpétuer cet exercice que les députés de l’Alliance du 8 mars la lui ont accordée.

Ce faisant, la classe politique libanaise, corrompue jusqu’à la moelle, confirme ce que les manifestants lui reprochent en étalant son indignité sur la place publique. Les Libanais lui crachent dessus et elle continue à affirmer qu’il pleut. Mais après la pluie viendra le beau temps. Elle sera bientôt balayée, mais à quel prix ? Elle laisse un pays surendetté, un secteur bancaire en faillite, une économie moribonde. La police et l’armée, qui protègent aujourd’hui la classe politique et répriment les manifestants changeront leur fusil d’épaule le jour où ils ne reçoivent plus leur salaire, donc très prochainement.

Comme diraient certains : il faut casser des œufs pour faire une omelette. L’effondrement du système serait ainsi salutaire, permettant aux plus authentiques d’édifier un Etat moderne ? Le Grand Liban né en 1920 avec des malformations génétiques aura tout de même vécu un siècle.

Dario S.

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